L'étoile blanche est, sans aucun doute, le marquage américain le plus connu; c'est aussi l'un de ceux qui pose le plus de problèmes aux amateurs de restauration de véhicules: pourquoi en existe-t-il diverses variantes ? Quelles sont les dimensions officielles ? Où et comment doit-on la placer ?
1940-42 : Les premiers emblèmes
1. L'étoile tricolore
Cette étoile, que l'on peut considérer comme le véritable premier emblème de nationalité, présente plusieurs points demeurés mystérieux. Tout d'abord, l'absence d'informations précises, les textes officiels restant étrangement muets à son sujet; ensuite, on peut constater qu'il en exista deux versions présentant des combinaisons inversées des teintes, combinaisons pour l'existence desquelles on ne possède aucune explication «sûre». Il ne fait toutefois aucun doute qu'elles furent toutes deux utilisées...
La première apparition de l'emblème remonte à l'année 1940. Il s'agit là d'un insigne identique au marquage national utilisé sur les avions depuis le 17 mai 1919 :
«Un cercle rouge placé à l'intérieur d'une étoile blanche à cinq pointes, elle-même placée à l'intérieur d'un cercle bleu. La circonférence du cercle intérieur sera tangente aux lignes formant un pentagone reliant les pointes intérieures de l'étoile» (Ordre n°20, Directeur de l'Air Service, 17 mai 1919).
En cette même année 1940, un emblème semblable, d'une taille n'excédant pas 8 pouces de diamètre, fait une timide apparition sur la plage avant de certains chars M2A4 de la «Provisional Tank Brigade»; l'année suivante, on peut constater que pratiquement tous les véhicules blindés portent un insigne de ce genre, mais sa taille s'est considérablement accrue: de 20 à 36 pouces, suivant les emplacements et les types de véhicules. Les tanks l'arborent généralement sur l'avant de la coque et sur l'arrière de la tourelle; les halfstracks en présentent un sur la radiateur, et un sur le dessus du capot. C'est à cette époque que l'on peut constater la présence d'une version aux couleurs inversées: le grand cercle de base possède une teinte rouge, et c'est le petit cercle, inscrit sur l'étoile, qui devient bleu. La disposition des teintes de cette nouvelle version nous fut confirmée par de rares documents couleurs datant de cette époque.
2. L'étoile bicolore
Elle n'est, au fond, que la continuation de l'étoile tricolore. Au printemps 1942, quelques mois après l'entrée en guerre des Etats-Unis, l'aviation américaine dans le Pacifique va faire enlever le cercle rouge situé au centre de l'étoile: on le confond trop facilement avec le «Hinomaru», le cercle rouge de nationalité (surnommée «boulette de viande», ou «Meatball») des avions japonais. Le 12 mai, les responsables de l'état-major combiné ordonnent officiellement la disparition de ce cercle sur tous les avions de combat, et ce ne sera qu'en juin que sera ordonnée sa disparition complète de tous les types d'avions.
3. L'étoile jaune
L'attaque japonaise sur Pearl Harbor, et l'entrée en guerre des Etats-Unis, allaient rendre nécessaire l'adoption d'un emblème de nationalité pour les véhicules. Le 28 janvier 1942, un ordre émanant du «Headquarters, Armored Forces» ordonna d'orner tous les véhicules blindés d'étoiles confectionnées au moyen de la peinture mate jaune portant le numéro 4 dans la spécification 3-1 du Quartermaster Corps.
Le choix de cette teinte avait, officiellement, été guidé par la nécessité du camouflage, le jaune mat étant jugé moins visible que le blanc, mais, officieusement, on prétendait que la présence d'anciens cavaliers à la direction des forces blindées n'était pas étrangère à cette décision, le jaune ayant toujours été la couleur traditionnelle de la cavalerie...
D'après cet ordre, chaque véhicule devait porter une étoile sur son avant, sur chacun de ses flancs, sur son arrière, et sur son capot. Bien qu'officiellement remplacée par une étoile blanche, nouveau symbole introduit par le War Department le 5 août 1942, l'étoile jaune des Armored Forces aura la vie dure; en novembre 1942, la plupart des véhicules blindés participant à l'opération «Torch» et à la campagne d'Afrique du Nord, arboreront toujours l'étoile jaune. Et, malgré un rappel publié en décembre 1942, il faudra attendre le printemps 1943, et la préparation au débarquement en Sicile, pour voir disparaître les étoiles jaunes des véhicules du NATOUSA (North African Theater of Operations).
1942 :L'étoile blanche
«§ 10 : Marquage dans les unités : la peinture soluble à l'essence, ou toute autre peinture qui serait prescrite par le War Department, sera utilisée.
Le symbole national:
1. Une étoile à 5 pointes, de teinte blanche, sera le symbole national pour tous les véhicules affectés aux unités tactiques. Les véhicules administratifs, utilisés dans les Théâtres d'Opérations, seront marqués de manière identique si le Commandant du Théâtre des Opérations l'autorise.
2. La taille de ce symbole national sera déterminée pour chaque type de véhicules. Elle devra cependant occuper le maximum de place sur les surfaces où elle doit figurer.
3. Lorsque la nécessité d'utilisation d'un camouflage prend la priorité sur l'identification, le symbole national peut être recouvert, soit par de la peinture mate de teinte Olive Drab pouvant se dissoudre à l'essence, soit par des filets de camouflage, soit par un mélange d'huile et de terre, soit être simplement effacé.»
Si ce texte fournit un certain nombre d'informations intéressantes, il n'en demeure pas moins fort laconique, et il est nécessaire de commenter chacun de ses points:
La peinture :
«Gasoline Soluble Paint (Corps of Engineers Tentative Specification n°T-1227)».
La peinture soluble à l'essence se présente sous forme de poudre qu'il suffit de faire dissoudre dans de l'essence pour obtenir une peinture à séchage rapide (15 à 20 minutes), qui dure plusieurs mois, et qui peut s'effacer par simple lavage à l'essence, ce qui la rend idéale pour la confection des marquages. En 1942, elle est fabriquée par deux firmes principales, «R.B.H. Dispersions, Inc», de Bound Brooks (NJ) et «Du Pont de Nemours and Co», de Wilmington (Delaware). Un changement, publié le 24 septembre 1945, substituera un autre type de peinture, «White Stenciling Synthetic Enamel» (peinture au vernis synthétique, pour pochoir, de couleur blanche), qui est semi-brillante et se présente toute préparée en pot de 1 ou 5 gallons.
«une étoile...» :
Les règlements officiels feront uniquement allusion à une étoile à cinq pointes, restant muets sur les diverses variantes rencontrées durant la guerre; la raison de ce silence est simple: ces diverses variantes seront toujours promulguées à l'échelon local (dans une unité, sur un Théâtre d'Opérations, pour toutes les unités participant à une opération précise,...).
«la taille...» :
la taille de l'étoile varie de 4 pouces (10,16cm) à 60 pouces (152,4 cm), en passant par toute une gamme de tailles intermédiaires; les règlements de 1942 comportent une série de planches montrant les emplacements et dimensions des étoiles requises pour chaque type de véhicule, et des corrections et modifications (changement d'emplacement ou de taille) seront parfois signalées, de même que des planches complémentaires seront ajoutées lors de l'introduction de nouveaux modèles de véhicules. Nous publions un certain nombre de ces planches. On notera cependant que toutes ces indications seront souvent suivies de manière très approximative par les troupes, et l'examen des photos démontre une grande diversité entre les marquages réels et les modèles théoriques.
On peut toutefois déduire une règle générale, selon laquelle le véhicule doit pouvoir être identifié aussi bien par un observateur terrestre que par un observateur aérien; une étoile doit donc figurer sur toutes les surfaces visibles (frontale, latérales et supérieure).
«lorsque la nécessité... » :
le 8 octobre 1943, un changement des réglements précisera l'autorité qui peut ordonner la suppression ou la dissimulation de l'emblème national:
«Le commandant d'un Théâtre d'Opérations peut ordonner l'effacement ou le recouvrement, au moyen de peinture, de l'étoile. Les commandants de formations subalternes peuvent prescrire une obturation temporaire au moyen de filets de camouflage, d'un mélange huile/terre, ou par d'autres expédients faciles à enlever.»
Dès la fin de la campagne de Normandie, nombre d'équipages de char ne s'embarrassent pas de ces règlements, et font purement et simplement disparaître de leur véhicule l'étoile, qui constituent un désastreux point de repère pour les pointeurs ennemis. Et, lorsque les chars américains traversent la Belgique en septembre 1944, un grand nombre d'entre eux ne portent aucune marque nationale...
Les diverses variantes
1. Etoile seule
Elle est habituellement peinte au moyen d'un pochoir; dans les débuts, sans doute avant la fourniture des pochoirs aux troupes, on a pu voir ' des véhicules ornés d'étoiles peintes à main levée, ce qui leur donne une forme assez irrégulière. Dans certaines unités, les hommes fabriquent eux-mêmes un pochoir constitué de deux éléments: un pentagone, qui sert à peindre le centre, et un triangle, qui permet de peindre les cinq pointes.
2. Etoile dans un cercle blanc :
Ce marquage fait son apparition au printemps 1943; il est prescrit par l'Allied Forces Headquarters, pour toutes les troupes opérant en Afrique du Nord, constituant la réponse aux doléances des aviateurs, car, vue d'une certaine hauteur, l'étoile blanche pouvait être confondue avec la croix blanche utilisée sur certains véhicules allemands. Cet emblème devient donc l'insigne d'identification aérienne officiellement reconnu, non seulement sur le Théâtre d'Opérations d'Afrique du Nord, mais également sur celui de Méditerranée, et plus tard sur l'ETO. Il est habituellement utilisé sur le capot et le toit de la cabine des véhicules à roues, sur le dessus de la tourelle et la plage arrière des blindés, bref, sur toutes les surfaces horizontales visibles d'avion, l'étoile simple continuant à être utilisée pour les autres positions.
Le cercle, quant à lui, existe en différentes variantes: uni ou brisé à quatre ou cinq places; il s'agit, en fait, du même emblème, et les ruptures du cercle ne sont dues qu'à l'utilisation d'un pochoir comportant des languettes de papier traversant l'espace libre du cercle, pour main-tenir en place la partie centrale. Certains «peintres» laissent subsister les cassures dans les cercles, et d'autres les éliminent en peignant ces emplacements, créant ainsi un cercle uni. L'ordre qui le présente n'indique pas de dimensions précises, mais l'épaisseur courante du cercle correspond à 1 /7 du diamètre de l'étoile.
3. Etoile dans un cercle jaune épais :
Afin de faciliter l'identification aérienne, l'«Allied For-ces Headquarters» ordonne, le 3 juillet 1943, que l'on double l'épaisseur du cercle entourant l'étoile, sur tous les véhicules des unités prévues pour participer à l'Opération Husky (débarquement en Sicile); de plus, l'ordre recommande d'utiliser, autant que possible, de la peinture jaune pour confectionner ces cercles épais, en précisant toutefois que, si cette teinte n'est pas disponible, les unités peuvent utiliser de la couleur blanche, bleue ou rouge, dans cet ordre de préférence.
4. Etoile et peinture détectrice de gaz vésicants :
Afin de permettre au personnel de se protéger efficacement contre ces gaz particulièrement insidieux, le Chemical Warfare Service crée un système de détection original, sous forme de peinture changeant de cou-leur au contact de la forme liquide de ces gaz, et appelée «Paint, Liquid Vesicant Detector M5». Cette peinture, que les manuels décrivent comme «Olive Green» (FM 21-40: Defense against chemical attack, 7 sept. 1942) ou «Conventional Olive Drab» (FM 17-59: Decontamination of Armored Force Vehicles, 17 oct. 1942), possède en fait une teinte brun jaunâtre, beaucoup plus claire que l'OD; au contact des gaz, elle de-vient rouge. Les règles concernant son application resteront toujours très vagues, autorisant ainsi chaque unité à les interpréter au mieux de ses intérêts. De nombreuses unités adopteront un schéma d'utilisation simple, fonctionnel et respectant l'esthétique du véhicule tout en étant constamment visible de la place du chauffeur: on appliquera la peinture autour de l'étoile du capot, dessinant ainsi un rond ou un pentagone, ou on comblera la partie située entre l'étoile et le cercle blanc.